Du 30 mars au 2 avril se tenaient les 9èmes Rencontres du réseau des ateliers vélo participatifs et solidaires : l’Heureux Cyclage.
Accueilli.e.s par l’association Mobil’Idées de Gap, les quelques 200 participant.e.s se sont retrouvé.e.s autour de groupes de discussions, de réunions formelles et de moments de convivialité (et aussi d’une gastro collective, mais c’est beaucoup moins sympa).
Temps forts au programme : la véloparade lumineuse du vendredi soir, et l’assemblée générale du samedi.
Amélie et moi (Leslie) nous y sommes rendues, je vous livre ici un aperçu personnel et totalement subjectif de ce séjour :
Ces rencontres permettent de se rendre compte de la diversité qui existe au sein du réseau, réunie autour de valeurs. Le fonctionnement peut varier du tout au tout. Certains ateliers sont basés dans des locaux, bénéficient de subventions et emploient des salariés. D’autres ont fait le choix du squat, de l’autofinancement, du seul bénévolat et d’ateliers mobiles.Les convictions ne sont pas les mêmes et ces différences créent le débat. Les argumentaires s’entrechoquent, se déconstruisent et se complètent. Mon cerveau s’est retourné plus d’une fois lors de ce week-end, je peux vous l’assurer.
Deux moments m’ont particulièrement marquée :
– Le forum ouvert
Il était proposé aux participant.e.s d’échanger comme lors d’une gigantesque pause café. Chacun.e pouvait proposer un sujet de conversation, que tou.te.s pouvaient rejoindre et quitter à n’importe quel moment. La règle étant « je prend mon pied, je suis intéressé.e par le sujet OU je prends mes 2 pieds et je vais suivre une autre conversation ». Intriguée par le thème proposé « Le VAE c’est cool » (le Vélo à Assistance Électrique), je m’installe à la table et écoute les différents avis sur la question. Très vite, deux clans s’opposent.
D’un côté, certain.e.s s’effraient de ce nouvel objet incitant au consumérisme matériel et énergétique, encouragé par les pouvoirs publics (via la prime de 20 % à l’achat). Dans leurs ateliers, ils/elles refusent de réparer les VAE. Car quand l’engin se complexifie, quid de la vélonomie (autonomie dans l’entretien et la réparation mécanique d’un vélo) ? « Nous ne sommes pas électriciens » disent plusieurs personnes. Soutenir le VAE, c’est aussi soutenir l’énergie nucléaire et les batteries non recyclables. Or le réemploi est l’une des valeurs fortes portées par l’Heureux Cyclage. Alors c’est non.
D’autres sont plus nuancé.e.s voire carrément pro-VAE. « Ce sont des vélos, et nous on promeut le vélo. Je ne vois pas où est le problème. Nous les réparons comme les autres » . Bon, mais encore ? Accueillir des VAE dans les ateliers, c’est éviter que certains partent à la poubelle. Certaines personnes aident pour les réparations basiques, et se forment peu à peu à la partie électrique. Autre argument évoqué : le VAE est nécessaire pour les personnes malades, handicapées ou portant de lourdes charges telles que des enfants ou des courses. A cela s’ajoutent les cas où l’on habite loin de son travail ou lorsque le relief est important.
Bien d’autres avis ont été exprimés, mais ce qui a vraiment bloqué concernait le positionnement du réseau. Au vu de tels écarts d’opinion parmi les ateliers adhérents, quel signal faut-il émettre au nom de tous ? La question reste encore à débattre.
– Le temps en mixité choisie
Nous nous sommes retrouvées pour un temps sans hommes cis-genres pour parler de cycloféminisme. Pour ce faire, nous nous sommes disposées en arc de cercle en nous classant selon l’ancienneté de notre engagement dans ce mouvement. Tour à tour, nous avons évoqué un moment fort dans notre prise de conscience. Chaque récit a contribué à dessiner la fresque du sexisme dans le monde du vélo. Dans la rue comme dans les ateliers, des propos et des comportements rabaissants nous agressent. La fréquence d’exposition est variable, la forme est plurielle mais le fond est le même. Nous étions plus d’une trentaine (à vue de nez), soit une vingtaine d’ateliers représentés et l’effet de groupe était saisissant. Cela était vraiment positif, rassurant et m’a donné beaucoup de force de voir autant de personnes engagées contre les discriminations de genre. A poursuivre !
En résumé : les Rencontres de l’Heureux Cyclage représentent un formidable espace de découverte et de discussion. Des liens se nouent entre les ateliers, l’entraide se développe, les outils et les expériences se partagent et chacun.e repart remonté.e à bloc et la tête pleine d’idées nouvelles.
L’année prochaine l’événement se déroulera à Bayonne chez les joyeux.ses drilles de la Txirrind’Ola.
Alors je sais pas vous, mais moi j’y retourne !